Sortie de route

5 décembre 2020 1 Par Nadiege

Je roule depuis un moment déjà dans la campagne. Je n’aime pas conduire la nuit, et en hiver elle tombe vite. Bien qu’il ne soit pas très tard, il ne passe pas grand monde sur cette voie, et sans la radio l’atmosphère serait franchement angoissante. Heureusement, je ne suis plus très loin. Dans une vingtaine de kilomètres, je rejoindrai la maison de mes parents qui m’attendent pour le week-end .

Dans le rétroviseur, la lumière des phares d’une voiture se rapproche. Elle va très vite, trop vite. Les gens conduisent comme des fous sur ces routes départementales ! Elle me dépasse à vive allure, se rabat et freine brutalement devant moi. Par réflexe, j’enfonce la pédale, j’essaie de  m’arrêter,  mais je mords le bas côté, et après une embardée, je finis ma course contre un arbre.

J’ai mal. Une douleur lancinante me transperce la poitrine. L’autre voiture s’est arrêtée, j’entends la portière qui s’ouvre. J’essaie de sortir du véhicule mais je ne peux plus bouger. Je suis coincée dans l’habitacle. J’ai un énorme poids sur la poitrine, je n’arrive plus à respirer. Ma vue se brouille.

J’arrive à peine à distinguer le conducteur qui s’avance. Il va m’aider, appeler les secours. Pourvu qu’il fasse vite ! Je ne veux pas mourir là, dans ma vieille bagnole ! Je sens que je m’enfonce, je tremble, j’ai peur. Pourquoi ne bouge-t-il pas ? Je ne vois plus ce qui m’entoure que fugitivement, quand j’arrive à soulever mes paupières.

Et soudain,  je le reconnais. Il est là au bord de la route, il me regarde étouffer avec délectation.  Il ne m’aidera pas.  A cet instant, je comprends que je vais mourir. Je ne lutte plus. 

Des images me reviennent. Je ressens à nouveau la douleur sur ma joue après qu’une gifle magistrale m’ait envoyée valdinguer contre le lampadaire du salon, je revois son regard haineux quand je lui ai demandé de sortir de ma vie, j’entends les cris, la porte qui claque. Mes larmes coulent. 

Je pense à papa qui aura allumé la cheminée, au chagrin de maman. Je nous revois ensemble.

J’ai froid, je ferme les yeux, tout est silencieux, je suis loin déjà…